@ Ad BABAD
Je te retourne le compliment. Ta glose, écrite de telle manière qu'elle parait cultivée et supérieure s'avère complètement vide et dénuée de toute argumentation dès lors qu'on la décortique ne serait-ce que 5 secondes.
Il n'est pas question dans mon cas de préjugés ni de "racisme" à l'endroit des Français (étant français moi-même !), mais simplement de constat, d'autant plus que j'avais spontanément utilisé le vocable "Français" dans son acception métonymique la plus large (c'est à dire en référence à la sphère francophone européenne).
La France reste le pays francophone occidental où Star Trek fut le plus mal diffusé et distribué : TOS (La série originale) est arrivée avec 15 ans de retard (et en sus incomplète) sur TF1, conférant ainsi d'emblée une image kitsch et obsolète à Star Trek par rapport aux productions d'alors (comme BSG 1978, K2000, Space 1999 en effet)… Et de cette réputation suscitant sourires altiers et doux mépris, Star Trek n'est hélas jamais parvenue à se défaire vraiment dans l'Hexagone (une triste réputation que le reboot de JJ Abrams n'a justement fait qu'accentuer par contraste).
Par la suite, TNG (La nouvelle génération) fut rapidement achetée par TF1 et annoncée en grande pompe (par Patrick Stewart himself), mais finalement jamais diffusée. Il fallut encore attendre près d'une dizaine d'années et les efforts infatigables d'Alain Carrazé pour que ce spin-off et les suivants soient diffusés... mais hélas de façon assez confidentielle sur une chaine payante du câble/satellite (Canal Jimmy).
Et ne parlons pas du gigantesque univers étendu, dont quasiment rien n'a été traduit dans la langue de Molière (hormis une éphémère collection chez Fleuve noir, et une autre plus éphémère encore chez Delcourt). Mais cela participe d'un syndrome plus général quant à la place de la SF dans l'édition et l'université française, en dépit des efforts méritoires de directeurs de collections tels Jacques Sadoul et Gérard Klein.
Quant à invoquer la popularité de Star Wars comme signe de pénétration de la SF en France, c'est pour le moins incongru, car l'univers de George Lucas demeure avant tout de la fantasy, ayant à ce titre bien davantage les faveurs des éducateurs et même des intellectuels.
Pour autant, je n'ai jamais prétendu que d'autres pays dans le monde n'ont pas été - eux-aussi - lésés. Mais il serait en revanche abusif de circonscrire le "phénomène socio-culturel Star Trek" autour des seuls USA. Dans les pays où "Star Trek" a bénéficié d'une large visibilité et accessibilité, sa popularité est généralement très grande. Cas notamment du Canada, du Royaume-Uni, et de l'Allemagne (probablement le pays le plus trekker de la planète).
Il y eut en effet une interruption de dix ans entre la série TOS et le premier film The Motion Picture (du moins si l'on fait abstraction de la série animée TAS en 1973). Et c'est précisément pour cette raison que j'avais fait débuter la période de "production continue" de Star Trek à 1979 (et non à 1966 ni à 1964 si l'on considère le pilote The Cage). Car à partir de 1979 et jusqu'en 2005, Star Trek a été bel et bien produit de façon ininterrompue, tantôt au cinéma uniquement, tantôt à la télévision uniquement, tantôt sur les deux médias à la fois… avec au pire trois ans d'écart entre deux films consécutifs, ce qui ne constitue absolument pas une interruption dans la production d'une saga ciné, a fortiori lorsque le film suivant est programmé au sortir du précédent (les définitions du dico que tu te plais à invoquer n'ont de valeur qu'appliquées à leurs contextes d'emplois).
Ainsi, le second film (La colère de Khan) est sorti en 1982 (pour une mise en chantier dès 1980), le troisième (A la recherche de Spock) en 1984, le quatrième (Retour sur Terre) en 1986 (ces trois derniers formant une trilogie indissociable), puis la série TNG est arrivée sur les petits écrans l'année suivante (en 1987). Et dès lors, la production télévisuelle n'a jamais cessé jusqu'en 2005.
Donc oui, comme je l'ai écrit, Star Trek n'a cessé d'être produit entre 1979 et 2005 (ST étant un univers aussi bien télévisuel que cinématographique) ! Difficile de prendre la poussière dans ces conditions…
Et il n'y a aucune mauvaise foi à écrire que Star Trek fut toujours le "state of the art" de son époque. Par "state of the art", je faisais bien sûr référence à ce qui est mesurable de façon objective, c’est-à-dire les effets spéciaux et dans une moindre mesure la mise en scène. Je ne faisais pas référence à l'accueil critique ou à l'adhésion du public, qui comme toute appréciation (même dominante) demeure quelque chose de très subjectif (et souvent manipulable).
The Motion Picture a rencontré un réel succès au box-office, et même si la critique fut mitigée (ce qui ne veut pas dire majoritairement hostile), ce film fut à l'époque une véritable démo pour showroom en alignant un festival non-stop d'effets spéciaux supervisés par le mythique Douglas Trumbull (2001, Rencontres du Troisième Type), et récompensés par plusieurs nominations aux Oscars et une victoire aux Saturn Awards. Et cette débauche visuelle fut justement ce qui fut le plus reproché au film, car elle se substituait littéralement à l'action ! Ainsi, beaucoup le trouvèrent soporifique (il y a gagna même le sobriquet The Motionless Picture), mais en même temps, d'aucuns furent envoûtés par son caractère contemplatif et cérébral, dans la lignée de 2001. Aujourd'hui, The Motion Picture est souvent considéré comme un OVNI cinématographique à gros budget, tandis que le titre peu enviable de "pire film de la saga Star Trek" revient généralement au cinquième opus L'ultime frontière de William Shatner.
Le "state of the art" dont je parlais s'exprime également par la contribution d'ILM à six des dix longs métrages historiques de Star Trek, et plus encore par les opulents budgets dont ont bénéficié les séries TNG puis Deep Space 9 (avec une quantité alors inédite de batailles spatiales épiques dans une série télévisée). Rien que 18 victoires et 58 nominations aux Emmy Awards pour TNG, soit un record encore inégalé pour une série de SF. Pas de la mauvaise foi, juste un fait.
Mais disposer à chacune de ses époques de production de la meilleure forme disponible n'aura pas pour autant poussé Star Trek à s'aligner sur la concurrence quant au fond. Jusqu'en 2005, les productions ST de Rick Berman ont eu le courage (et l'indépendance d'esprit) de rester fidèles à la vision idéaliste (du moins en apparence) de son créateur Gene Roddenberry (parti pris assez original, car les SF futuristes sont pour la plupart dystopiques), et surtout à la vocation très philosophique de son cahier des charges originel (questionnements existentiels et ontologiques, exploration de conditions peu anthropomorphes, relativisme moral et absence de manichéisme, pure SF parfois à la limite de l'abstraction…). Du coup, une lecture superficielle de cet univers pourra conduire à le trouver gentil, naïf, bavard, chiant, statique, fermé sur lui-même, geek, répétitif, ou encore "très très mou" (qualificatif dont tu gratifies apparemment DS9). Mais une lecture plus approfondie révèle une réalité tout autre, très littéraire en fait... [et sur laquelle je ne vais pas m'étendre présentement, car ce serait du HS complet, ma réponse étant déjà assez longue comme ça ]
En 1990, TNG était la seule série de SF space-op à l'antenne (l'historique Doctor Who 1963 s'étant achevée en 1989). Mais en 2000, les séries de SF étaient devenues foison (une "normalisation" à laquelle Star Trek fut loin d'être étranger d'ailleurs). Pour autant, prétendre que rien de neuf n'a été fait dans la sphère trekkienne après DS9 (achevée en 1999), c'est juste portnawak ! Car la série prequelle Enterprise (débutée en 2001) a apporté un considérable renouvellement de regard et de ton (avec entre autres un côté "Right Stuff" encore inédit en SF télévisuelle) tout en exacerbant l'esprit pionnier de Star Trek. Contrairement aux calomnies ayant circulé sur le web (fabriquées de toute pièce et propagées par les trekkies fétichistes), ENT n'a pas détruit le Canon d'origine ! Bien au contraire, non contente de respecter scrupuleusement ledit Canon (mais en le complexifiant), la série prequelle est parvenue à créer une passerelle crédible entre notre réalité et l'utopie trekkienne, tout en résolvant brillamment de nombreuses incohérences internes qui subsistaient au sein du Trekverse (notamment dans TOS). Loin d'avoir fait du tort à Star Trek, Enterprise l'a carrément grandi !
Et comme je ne fais justement pas partie des trekkies fétichistes (ni même des trekkies tout court ne t'en déplaise !), je n'ai jamais allégué que le reboot de JJ Abrams avait rétroactivement fait du tort à l'univers historique de £Star Trek. Non, ce que je dis, c'est que ce reboot est un faux Star Trek qui tente de se faire passer pour un vrai à grand renfort de clins d'œil grossiers (à l'usage des trekkies) et de clichés incultes (à l'attention des newbies).
En revanche, quelle leçon de marketing ! C'est digne de Don Simpson. Sur ce plan-là, difficile de ne pas être admiratif. Après, libre à chacun de se faire avoir (ou non) par cette arnaque magnifique.
Et il n'y a rien de péremptoire ou de gratuit de ma part, étant donné que j'ai pris la peine de corroborer point par point cette argumentation en d'autres lieux (du web notamment)...
Quant à BSG 2003 que tu sembles ériger en référence absolue, il s'agit en effet d'une superbe série (que l'on doit d'ailleurs à un vétéran de Star Trek). Et je n'ai pas attendu tes pieuses recommandations pour la découvrir et en devenir fan (depuis plus de neuf ans !). Et en effet, le millésime 2003 a proprement néantisé les versions de 1978/1980, car Ronald D Moore est un très grand auteur.
Mais ST joue dans une autre cour... tant leurs vocations respectives sont foncièrement différentes ! BSG 2003 est une série de stricte transposition politique et religieuse qui commente la sociologie étatsunienne au prix d'un USA-centrisme très marqué et d'une "dark attitude" parfois nivelante (psychologiquement parlant), flirtant d'ailleurs avec le soap-opera. La pure SF (alias "exploration de tous les possibles") en est relativement absente (ou demeure à la marge), et de ce fait, son spectre sémantique "larger than life" est bien moins étendu que dans Star Trek. Ce n'est pas moi qui le dit, c'est Ronald D. Moore lui-même !
Quoi qu'il en soit, tu as beau prétendre avoir étudié en détail le phénomène Star Trek, ton post suggère le contraire ! Tes argumentations sont plombées par un fatras d'idées reçues, de clichés, et de légendes urbaines qui circulent sur le compte de cette franchise. Lorsque tu connaîtras (et considéreras) vraiment l'histoire et le contenu réels des quarante années de Star Trek, nous pourrons en discuter sérieusement.
Longue vie et prospérité également.